« Je vous parle en tant que poète, noire, féministe, lesbienne, mère, guerrière, professeure et survivante du cancer »: Audrey Lorde

Sa vie est un roman, son combat à travers la poésie et ses nombreux écrits ont été des moteurs chez les artistes noirs, le mouvement de libération des femmes et des homosexuels et le mouvement pour les droits civiques. Poètesse noire, féministe, lesbienne, mère, guerrière, Audrey Geraldine Lorde s’est battue toute sa vie contre le racisme, le sexisme, l’homophobie et toutes les autres formes d’injustices sociales.  « Nos silences ne nous protégeront pas. .. On ne détruit pas la maison du maître avec les outils du maître.  » : ses paroles sont lourdes de sens et elle encourageait son public à reconnaître les différences et à les utiliser comme des forces de changement. Audrey Lorde est née en 1934, à New York de parents originaires de Grenade, Frederick Byron Lorde et Linda Gertrude Belmar Lorde. Malvoyante, elle grandit à Harlem pendant la Grande Dépression, écoutant sa mère lui parler des Caraïbes. Elle n’apprendra à parler qu’à l’âge de quatre ans. Cette incapacité à appréhender, immédiatement, le langage, expliquera l’importance qu’elle accordera plus tard à la langue et à la poésie. Sa mère lui apprendra à lire et à écrire. Lorde écrira son premier poème à l’âge de treize ans. Et dans une démarche de réappropriation identitaire, elle retire le « y » de son prénom. Audrey, devient alors Audre. Elle étudiera dans un lycée élitiste majoritairement réservé aux blancs et côtoiera des amies blanches, intéressées par la poésie, l’occultisme et mettra de côté son identité noire. Victime du racisme, de ségrégation raciale, elle subit de nombreuses humiliations. Elle vivra, ensuite, une forte relation d’amitié avec une danseuse noire, également étudiante au Hunter College High School. Genevieve Johnson, Gennie, devient son alter-ego et son premier amour platonique. A peine âgée de seize ans, Gennie se suicide sans laisser aucune explication. Lorde est traumatisée et ressent un lourd sentiment de culpabilité. Elle quitte sa famille et trouve un travail de nuit à l’hôpital afin de pouvoir étudier la littérature. Elle entretiendra une liaison avec un homme blanc et subira un avortement clandestin difficile. Elle trouvera difficilement du travail car les sociétés n’emploient guère les afro-américaines. Elle rencontre Ginger Thurman, noire, elle aussi. Elle sera sa première amante et a partir de là, Audre commence à se dire officiellement gay. Elle milite avec le collectif Free the Rosenbergs. Avec ses économies, Lorde finance son voyage au Mexique en 1954 en vue de passer une année à étudier à l’université nationale autonome du Mexique. Elle s’installe dans la banlieue de Mexico, à Cuernavaca. Ici, elle tombe amoureuse d’une journaliste blanche Eudora Garrett. C’est une grande et belle période d’affirmation et de renaissance : son identité personnelle et artistique est évidente pour elle: elle s’affirme en tant que lesbienne et poétesse. De retour à New York, elle publie la nouvelle La Llorona dans la revue Venture sous le pseudonyme de Rey Domini. Elle fréquente la communauté lesbienne qui se réunit dans plusieurs bars à East et West Village, dans un milieu majoritairement blanc. Elle poursuit son travail d’écriture et partage sa vie avec Marion Masone, une jeune femme Blanche schizophrène dont elle se séparera après deux ans de vie commune. Elle obtient son Bachelor’s degree en 1959 et poursuit ses études à l’université Columbia. Elle aura une maîtrise en sciences des bibliothèques en 1961. Elle travaille alors comme bibliothécaire à la bibliothèque municipale de Mount Vernon. À partir de là, Lorde est publiée dans des magazines littéraires noirs, des anthologies de poésie et particulièrement dans une anthologie de poésie Noire, éditée par Langston Hughes. La maison d’édition de Diane di Prima, Poet’s Press, publiera le premier recueil de poèmes de Lorde, The First Cities, en 1968. En 1962, Lorde se marie avec un juriste, Edwin Rollins, un homosexuel blanc. Chacun poursuit sa vie amoureuse de son côté. Ils auront deux enfants, Elizabeth et Jonathan, avant de divorcer en 1970. Lorde rencontre Frances Clayton, une professeure de psychologie, qui devient sa compagne. Elles vivront à Staten Island, ensemble avec les enfants de Lorde, jusqu’en 1989. Ensuite, Lorde commence à jouir d’une grande renommée en Europe et notamment en Allemagne. En 1984, elle est professeure invitée au John F. Kennedy-Institute for North American Studies de la Freie Universität de Berlin. Sa santé se fragilise. Un cancer du sein lui sera diagnostiqué en 1978, elle subira une mastectomie. Et six ans plus tard, elle sera atteinte d’un cancer du foie. Elle va se battre et devenir encore plus active. Elle publie The Cancer Journals, en 1981 et fera l’objet d’un documentaire A Litany for Survival : The Life and Work of Audre Lorde. Au cours d’une cérémonie de baptême africain, Lorde prend le nom de Gamba Adisa, qui signifie Guerrière : celle qui se fait comprendre. Lorde décède le 17 novembre 1992 à Saint-Croix, dans les Îles Vierges des États-Unis. Toute sa vie, elle encourage les femmes à « transformer le silence en parole et en acte », à puiser au cœur de leurs expériences, de leurs émotions les plus profondes, pour les sublimer grâce à l’écriture. Pour elle, « la poésie n’est pas un luxe, c’est une nécessité vitale » et « le départ de toute action ». En préambule de ses séances de lectures publiques, elle aimait démarrer en lançant : « je vous parle en tant que poète, noire, féministe, lesbienne, mère, guerrière, professeure et survivante du cancer ». Audre Lorde affirmait ses identités multiples. 

Poésie
* The First Cities (1968)

* Cables to Rage (1970)

* From a Land Where Other People Live (1973)

* New York Head Shop and Museum (1974)

* Coal (1976)

* Between Our Selves (1976)

* The Black Unicorn (1978)

* Undersong: Chosen Poems Old and New(1982)

* Our Dead Behind Us (1986)

* Need: A Chorale for Black Woman Voices(1990)

* The Marvelous Arithmetics of Distance (1993)
Prose
* Uses of the Erotic: The Erotic as Power (1978)

* The Cancer Journals (1980). Traduction : Journal du cancer suivi de Un souffle de lumière, Québec, Mamamélis/Trois, 1998.

* Zami: A New Spelling of My Name, Mythobiography (1983). Traduction : Zami : une nouvelle façon d’écrire mon nom, Québec, Mamamélis, 2001.

* Sister Outsider: Essays and Speeches (1984). Traduction : Sister Outsider, essais et propos d’Audre Lorde, Mamamélis, 2003.

* I Am Your Sister: Black Women Organizing Across Sexualities (1985)

* A Burst of Light: Essays (1988)



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